Perdue
L'année débute difficilement avec beaucoup d'inconnues & la maladie qui ne nous quitte pas.
Une nouvelle vie s'approche doucement, un nouveau port, encore un changement, après trois années d'Italie. Et notre prochaine cabane pourrait bien se monter au Congo.
Ce que j'aurai appris ici, en Italie : la solitude, le détachement, le renoncement. Cela paraît étonnant et pourtant. S'apercevoir qu'on peut se passer d'énormément de choses et se dire qu'on peut faire encore mieux. Et je crois que l'Afrique sera le lieu idéal. J'ai peur mais j'ai envie : envie d'arrêter de travailler, envie de prendre le temps. Ici, j'ai appris à moins courir. Paris, je l'aime mais quand j'ai le temps. Milan m'a permis de prendre le temps mais, de par mon travail, je cours quand même. Et je ne veux plus courir et être stressée. Surtout, je ne veux plus travailler pour certaines personnes qui ne savent pas ETRE.
Mais est-ce que je le sais, moi, ETRE ? Certainement pas...
L'Afrique nous tend donc les bras : Pointe Noire plus précisément. Ce n'est pas encore fait mais c'est quasiment sûr. Quand ? Au plus vite... Encore une fois, ce ne sera pas simple. Je vais sans doute me retrouver seule quelques mois avec les enfants avant de rejoindre notre nouveau pays d'accueil.
Je me réjouis de ce changement car depuis mon retour au travail, je ne suis pas heureuse. Je pleure souvent, j'ai le sentiment de ne plus rien savoir, de me perdre complètement et tout ça pour rien ; tout ça pour un chèque à la fin du mois. J'ai besoin de me retrouver, de me découvrir à nouveau et de ne pas baisser les bras. J'ai besoin de ne pas renoncer et me résigner. Je peux être meilleure, je peux être plus heureuse, je peux, je peux, je peux.
Prendre le temps : j'aurais tort de ne pas me réjouir de pouvoir jouir de ce bien si rare.
Je ne préfère pas imaginer que je vais faire des choses extraordinaires si nous partons en Afrique car je pourrais très bien végéter pendant 2 ans et puis qu'on reparte sans que je n'ai rien fait. Pour l'Italie, qui est pourtant l'Europe, j'ai eu un temps d'adaptation assez long. J'ai appris la langue rapidement, ce n'est pas le problème. Mais je ne suis pas allée beaucoup vers les autres. Sans doute parce que personne n'en avait besoin. Sans doute aussi parce que j'avais besoin de retrouver ma famille et de me retrouver au lieu de toujours fuir. Mais je n'ai rien trouvé à aller chercher. J'ai juste eu envie de voir du pays et quel pays ! J'aime tout ici. Sauf le superflu qui transpire de partout. Sauf le paraître qui laisse peu de place à l'être. Et pourtant, toute l'Italie n'est pas "fashion". Mais je n'ai pas souvent fait des rencontres incroyables. Juste une fois, un train, une panne et un italien qui lisait exactement le même livre que moi de Tiziano Terzani. Je devrais sans doute plus souvent prendre le train... J'en connais un qui ne me contredira pas... Nos plus belles rencontres se sont aussi faites dans la campagne, loin de tout. Des rencontres humaines, des paysages époustouflants et des saveurs indescriptibles. Ce sont ces choses-là aussi qui m'ont donné envie d'authentique.
Je m'isole pour apprendre l'essentiel et me préserver. Il m'arrive souvent de remonter sur Paris et de ne le dire à personne. Comme si je n'existais pas.
Il est temps pour moi de disparaître... Soit je reviens toujours italienne soit africaine...
Mais j'aimerais revenir, tout simplement.
Comme j'aurais aimé être sa contemporaine...
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